Préambule : je songe avant même de vous glisser mes pensées ici, à tous ceux qui vont soutenir le contraire de ce que je vais écrire, toutes ces exceptions qui ne feront que confirmer ce que je pense être une règle. Je ne base mon analyse que sur mon expérience, et bien sûr, celle-ci se cantonne à ma vie et à l’observation de celle des gens que je croise ou qui m’entourent. Donc avant même d’entendre les contradicteurs je dis : Oui il y a des exceptions mais ayons l’humilité d’accepter ou de reconnaître que nous n’en sommes pas ou ne vivons pas forcément dans l’exception. J'ajouterai que je ne parle ici que des femmes mais j'imagine que les hommes ne sont pas vraiment différents sauf que je n'en fréquente pas.

A quoi les femmes se réfèrent-elles lorsqu’elles parlent de cette fameuse "étincelle" qui va les pousser à démarrer une relation (ou pas), à la creuser ou à la faire avorter. Je dis "avorter" car après un ou deux RV on ne peut pas considérer qu’on connaît quelqu’un. Dès lors, le choix que l’on fait n’est basé que sur une perception, une intuition et non sur la connaissance de l’autre.

En fait, sans le savoir, quand elles parlent d'étincelle, elles se réfèrent à quelque chose qu’elles ont connu plus jeune. Une flamme qui existait dès les premiers instants d’une rencontre.

Elle avait 20 ans, le trouvait marrant, mignon, craquait sur son sourire et le coeur se mettait à battre au bout de peu de temps. A peine l’avait-elle quitté que déjà elle pensait à lui et avait hâte de le revoir. Sans même parler de coup de foudre ou de passion, bien que cela semble s’en rapprocher, il s’agissait d’une sensation assez forte, vite perceptible, une sensation qui la poussait vers l’avant et vers l’avenir.

Par la suite, parce que toutes les femmes ont connu, étant jeunes, des histoires d'amour qui ont commencé par cette étincelle, elles ont tendances à appliquer inconsciemment l’équation suivante pendant une bonne partie du reste de leur vie :

Homme qui me plaît + étincelle = possible histoire d’amour (ce qui n’est pas faux)

mais d’en tirer aussi une autre équation qui semble logique mais qui est complètement fausse celle-là:

Homme qui me plaît + pas d’étincelle = histoire d’amour impossible à terme

Et cette seconde équation va de soi pour les femmes parce qu’elles partent du postulat implicite suivant :

"C’est grâce à l’interaction qui se crée (ou pas) entre un homme et une femme, que naît une étincelle chez elle (ou pas)." Autrement dit, "l'étincelle" est un indicateur fiable d'une interaction amoureuse ou de son absence.

Et c’est vrai que si ce postulat se vérifiait, la seconde équation serait valable. Le problème c’est que ce postulat est complément faux, "l'étincelle" n'est un indicateur de rien du tout. Je m’en expliquerai plus bas.

Partant de là, assurées que "l’étincelle" est là clé pour ne pas se tromper, les femmes vont totalement et aveuglement s’en remettre à elle pour persévérer ou laisser tomber.

Cela amène la plupart d'entre-elles à ne plus se lancer dans une relation même quand elles rencontrent quelqu’un qui a objectivement tout pour leur plaire au départ, quelqu’un qui d’ailleurs, rencontré quelques années plus tôt les aurait probablement faites "craquer".

Cela aboutit à une existence jalonnée de rencontres sans suite ou d’aventures plus ou moins brèves, et une raréfaction des histoires d’amour, voire leur absence totale puisque pour qu’il y ait histoire encore faut-il qu’il y ait relation dans la durée et que ces femmes aveuglées ne laissent dés lors pratiquement plus de temps à aucune relation de s’installer, n’y croyant pas, dés le départ (par manque de "feeling", ce fameux et souvent pathétique "feeling", je déteste ce mot franglais).

Elles ont tellement été habituées à associer "étincelle" à "perspective amoureuse" que si "l’étincelle" n’est pas là, elles perdent toute envie, toute motivation d’aller plus loin, persuadées que même si elles se lançaient, ça n’aboutirait à rien (donc autant zapper tout de suite et chercher ailleurs).

Mais le hic, c’est que le postulat implicite sur lequel repose leur raisonnement est faux (je vais le répéter pour être limpide) :

"C’est grâce à l’interaction qui se crée (ou pas) entre un homme et une femme, que naît une étincelle chez elle (ou pas)."

Donc tout raisonnement/choix/réflexion qui découle de cette idée, est une purement et simplement une aberration. Et c’est malheureusement sur la base de cette aberration que les femmes vont orienter leur choix à venir.

Alors en quoi, croire que "l’étincelle" est un indicateur fiable, est une grossière erreur ?

Tout bonnement parce que ça n’est pas l’interaction entre deux personnes qui est responsable de cette étincelle. C'est seulement l’état psychique/l'etat d'esprit de la femme à ce moment là indépendamment de la personne qui est a en face.

Je m’explique.

Lorsqu’on est jeune, que notre personnalité se construit ou s’affirme, on est par nature très entier, idéaliste, excessif, optimiste, rêveur. Bref, on a une tendance naturelle à s’emballer pour tout ce qui est nouveau et agréable (une personne, une activité, un projet). On ne décide pas de s’emballer, c’est juste comme ça que l’on réagit à cet âge là et cela ne relève d'aucun choix. Devant une même situation qui, quelques années auparavant, nous aurait fait tourner la tête, on réagit de façon plus sereine, moins passionnée quand on a prit "de la bouteille".

On a beau ne pas avoir la sensation de changer ou de ne rien faire pour, le temps et les événements s’en chargent. On ne réagit plus de la même façon que par le passé et surtout nous ne percevons plus les choses de la même façon.

Ça n’est pas ce qui est autour de nous qui change mais simplement notre perception des choses. C'est un peu comme lorsqu’on revient dans la cour de notre école maternelle et que l’on a l’impression que tout est devenu plus petit. On avait gardé le souvenir de ce lieu vu par nos yeux d’enfants et on est est un peu déçu de se rendre compte que l’arbre géant de nos souvenirs, ce chêne qui trônait majestueux au milieu d’une immense cour de recréation n’est en fait qu’un arbre bien banal planté au milieu d'un patio étroit.

Mais on sait bien que l’arbre n’a pas rapetissé entre le temps où nous étions enfant et aujourd’hui. C’est donc bien notre perception qui a changé et finalement, cette cour immense avec son bel arbre perd soudainement de sa magie. Passé par le prisme de nos yeux d’adulte ça n’est qu'une petite cour avec un arbre normal.

En ce qui concerne les choses ou les lieux, il est aisé de se faire une raison et d’admettre que c’est notre perception qui est en cause et non les éléments extérieurs. Malheureusement il semble en être tout autrement en ce qui concerne les sensations.

Difficile d’admettre que ce qui vous a fait chavirer un jour ça n’était pas la personne mais simplement la perception que vous aviez d’elle avec votre coeur, vos yeux, votre esprit d’ado ou de jeune adulte.

Mais, comme l’arbre de la cour d’école, le même homme avec le même sourire et les mêmes qualités, vu par un coeur d’ado ne provoque pas du tout la même réaction que vu par un coeur d’adulte. Pourtant objectivement c’est bien la même personne.

Et si on n’arrive pas à admettre, d'une part que les sensations qui nous ont tant plues appartiennent à une période passée où nous étions psychologiquement aptes à les vivre et d'autre part que ces sentiments n'étaient absolument pas liés à la personne qu’on avait en face de soi à ce moment là alors, on est voué à rechercher indéfiniment l’impossible. Aucun homme ne pourra provoquer une sensation qui appartient au passé, qui n’existait que parce qu’on était soi-même différent de ce que l'on est à présent. Aucun homme ne saurait faire reculer le temps.

Si on comprend cela, se référer à ce fameux "feeling" pour se projeter dans une possible relation avec un homme est bien une aberration lorsqu’une femme n’est plus adolescente ou très jeune. Il est probable qu’elle ne ressente plus jamais ce "petit truc" ou en tous cas extrêmement rarement car sa propre configuration a changé. Le problème alors n’est pas l’homme qu’elle a en face d’elle mais juste le manque total de discernement dont elle fait preuve à propos d'elle-même.

J’irai même encore plus loin dans mon raisonnement en affirmant que cet état de fait est normal, et qu'il serait malsain qu'il en soit autrement. En effet, se remettre à ressentir - adulte - des sensations qui appartiennent à l’adolescence est plutôt un signe d’immaturité et de déséquilibre, et fonder une possible relation là-dessus est pour le moins périlleux.

Aznavour a écrit : "il est doux de revenir aux sources du passé, on a souvent besoin d’un bain d’adolescence" et je suis d’accord, mais ne se fier qu’à cette époque révolue pour prendre des décisions essentielles telles que juger la viabilité potentielle d’une relation pour anticiper l'avenir est complètement irrationnel et immature.

Cela ne peut mener qu’à une seule chose, passer à coté de personnes qui ont tous les atouts pour nous faire vivre une belle relation et dont le seul vrai handicap est une incapacité à faire naitre une “étincelle” qui appartient à un passé révolu !

Tant qu’il n’y aura pas cette prise de conscience essentielle et que les femmes continueront à ne se fier qu’à cette sensation subjective et anachronique pour présager de leur sentiments à venir envers quelqu’un qui a, au départ, à priori tout pour leur plaire, il n’y a aucune raison pour que les choses changent. Ce ne seront toujours que des déceptions ou des semi échecs.

L’amour n’arrive pas par hasard, ne naît pas d'une "étincelle" mais il se construit. Cela me semble une évidence mais ça ne semble pas l’être pour tout le monde. Cela fait d'ailleurs l’objet de mon prochain billet intitulé "L'amour existe-t-il d'emblée ou se construit-il ?".